Gardien Party

Valérie Mréjen et Mohamed El Khatib ont rencontré des gardiens de musée du monde entier. Au fil des discussions de grands traits sont apparus : les regards méprisants, les histoires de collègues entre eux, la proximité imposée au gré des attributions de salles, les horaires, le rituel des pauses, la hiérarchie, le rapport des visiteurs aux œuvres. Le fait de devoir interdire, rappeler à l’ordre, répéter à maintes reprises, tenir ce rôle ingrat auprès de gens souvent rétifs aux consignes, de visiteurs qui se sentent légitimes, autorisés, un peu chez eux, ou qui pensent qu’ils connaissent mieux les œuvres, n’ont pas de leçons à recevoir, ont payé leur ticket, sont en vacances, ou encore qui considèrent tout simplement qu’ils n’ont pas à se plier aux rappels insistants de personnes qui leur sont socialement inférieures.

Avec Margarita Pavlovna Khissamova (Russie), Seung Hee Kim (Corée), David Hibernie (France), Carolina Hindsjö (Suède), Robert Smith (Etats-Unis), Jean-Paul Sidolle (France), ils ont conçu un spectacle qui se donne dans les musées. Plusieurs langues se croisent, pour entendre toutes ces paroles et ne pas tout saisir — tous ne se comprennent pas forcément entre eux tout en voyant ce que chacun veut dire —, pour retrouver ce qu’ils éprouvent au quotidien face à ces visiteurs venus d’un peu partout, égarés dans le labyrinthe ou tentés de toucher les œuvres.

Le texte de cette performance est souvent drôle, toujours touchant. Gardien Party donne à voir et à entendre ces gens qu’on voit à peine, mais qui voient tout. Ils sont là, pas loin, vigilants, lorsque nous regardons. C’est une autre histoire du regard qui commence par cette annonce : « Vous êtes à la recherche d’un emploi stable. Vous n’avez pas nécessairement le sens des responsabilités. Dynamisme relatif. Esprit d’initiative modéré. Vous n’aimez pas relever de défis, encore moins les challenges. Vous êtes plutôt sédentaire. Contactez le service Ressources humaines du Musée. »